Tambours et Objets rituels des Devins Kulung Rai de l’Himalaya Nepalais

ETHNOFLORENCE

INDIAN AND HIMALAYAN

FOLK AND TRIBAL ARTS

2008 – 2016

n. 673

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TAMBOURS ET OBJETS RITUELS DES DEVINS

KULUNG RAI DE L’HIMALAYA NÉPALAIS

GREGOIRE SCHLEMMER

 

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COPYRIGHT POUR LE TEXTE ET LE PHOTOS

GREGOIRE SCHLEMMER

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LETTRE DU TOIT DU MONDE

SEPTEMBRE 2013

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Cet article présente les différents objets rituels utilisés par les chamanes (ou « devins ») Kulung, une population de l’Himalaya népalais.

Ces objets, et notamment les tambours, ascinent ; ceci tant à cause du personnage mystérieux qui l’utilise, que du rythme envoûtant et du contexte cérémoniel déroutant dans lequel ils sont utilisés.

A cela, il faut ajouter la beauté de l’objet.

Celle des tambours ḍhyāngro  du centre et de l’est du Népal est connu : on en trouve en grand nombre à vendre dans les boutiques de Katmandou.

Notre objectif est avant tout descriptif : il s’agit de présenter ces objets, leur origine et leur fonction, afin de combler un manque de documentation concernant le cadre de leur usage.

On verra néanmoins qu’il est possible d’en tirer certaines hypothèses relatives a l’institution chamanique .

Cette presentation est issue d’une note realisee pour   l’ethnologue Michael Oppitz en vue de la réalisation de son monumental livre sur les tambours chamaniques de l’Himalaya (2013), revisee et etendue suite a la proposition  de François Pannier, de la Galerie du toit du monde, d’en faire une publication.

Les informations présentées ont été recueillies par observations et interviews réalisées avec une cinquantaine de Kulung de la vallée de l’Hongu (et principalement du village de Bung), dont une dizaine de devins, entre 1996 et 2008.

Pour une présentation plus détaillée de l’organisation socio-religieuse des Kulung, voir Schlemmer, 2004.

Les termes en italiques à l’origine son précisée sont en kulung, ceux suivis d’un  en népali.

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LES KULUNG ET LEURS DEVINS

QUI SONT LES KULUNG?

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Les Kulung forment un groupe de langue tibéto-birmane d’environ 30 000 personnes, qui font partie des Rai (une vingtaine de groupes aux langues et à la culture proches) et par conséquent des Kirant (qui incluent, en plus des Rai, les Limbu et les Sunuwar), vivant à l’est du Népal.

Ils parlent des langues de la famille tibéto-birmane, mais de branches différentes de celles de la majorité des groupes de cette famille linguistique habitant le Népal – les Gurung ou les Tamang en particulier – et, contrairement à ces groupes, ils ne se disent pas venir du nord du Tibet, mais du sud.

Leurs mythes les présentent comme un ancien peuple de chasseurs et d’essarteurs ayant progressivement occupé les collines de l’est du Népal, jusqu’aux dernières vallées habitées avant les sommets himalayens.

C’est dans l’une de ces vallées septentrionales, la vallée de l’Hongu, que se sont fixés les Kulung (il y a, d’après leur généalogie, une vingtaine de générations, soit quatre à cinq siècles),

Elle forme depuis lors leur territoire ancestral.

Cet ancrage territorial fut renforcé ultérieurement du fait de la reconnaissance de droits fonciers spécifiques (kipat) par l’administration népalaise, suite à leur intégration dans ce royaume à la fin du XVIIIe  siècle.

Depuis le xixe, des migrations se sont progressivement opérées vers le sud-est, jusque dans la plaine du Terai, et de nos jours, la moitié des Kulung environ habitent hors de la vallée de l’Hongu ; mais c’est de ceux-là seuls qui sont restés dans ce territoireque nous parlerons.

Ils se répartissent en une dizaine de villages, tous pluriclaniques (les Kulung se répartissant en une vingtaine de clans atrilinéaires et exogames s’étendant sur sept générations).

Ils disent descendre de deux frères qui auraient fondé le groupe.

Ils y vivent de la culture en terrasses et d’élevage, et d’un peu de portage.

Dans ce pays pluriethnique qu’est le Népal, le haut de la vallée de l’Hongu, qui forme la zone d’habitat des Kulung, se caractérise par un peuplement quasi mono-ethnique (il est des hameaux Sherpas dans les hauteurs, des hautes castes Chetri au sud et quelques basses castes de forgerons Kami dans les villages Kulung).

La raison en est certainement que, dans cette vallée relativement élevée et abrupte (les villages se trouvent autour de 2 000 mètres), le riz pousse peu ou prou.

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LES DEVINS

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Ce relatif isolat (habitat mono-ethnique situé hors des routes de commerce), doublé du fait que les Kulung eurent un statut privilégié de maîtres de la terre, a contribué au fait que, si l’hindouisme a influencé leurs conceptions et pratiques religieuses, ils ont maintenu une organisation religieuse qui leur est spécifique, le ridum.

Ce terme, qui signifie littéralement « généalogie » et « mythe », renvoie aussi à l’ensemble du savoir-faire légué par les ancêtres afin de gérer la relation à la pluralité des forces invisibles – les esprits –, via les nombreux rites (chaque maisonnée en exécute une trentaine par an).

Ceci cumulé au fait de leur origine non tibétaine et de leur supposée présence très ancienne au Népal rend l’étude de ces traditions intéressante pour comprendre les paticularités religieuses des populations spécifiquement népalaises.

Les rites importants – les rites territoriaux (seules pratiques véritablement collectives), les funérailles et les rites à l’esprit tutélaire Nagi – sont réalisés chacun par un officiant spécifique.

Mais la majorité d’entre eux le sont par des officiants, qui sont, avant tout, des chamanes ou, comme je préfère les appeler, des « devins » (1). S’il y en avait auparavant peu (entre un et deux par village dans les années 1960), leur nombre a fortement augmenté depuis.

Dans le village de Bung, ont en compte une trentaine pour trois cents maisons, dont un certain nombre de femmes.

Il est difficile d’expliquer cette forte augmentation car, pour les Kulung, l’accès à la fonction de devin ne résulte pas d’un choix personnel.

C’est la divination faisant suite à une maladie qui révèle que l’esprit tutélaire des devins a choisi telle personne pour qu’elle l’honore : le malade n’aura alors pas d’autre choix quede lui rendre culte. Cette divination peut aussi etre réalisée suite à des signes avant-coureurs, car l’appel peut aussi s’opérer par des rêves (tels que la vision de tel ou tel élément de l’attirail du devin), voire par des enlèvements (des devins racontent qu’ils tombèrent inconscients et furent enlevés, nourris et enseignés par l’esprit tutélaire, avant d’être ramenés chez eux).

De plus, on dit que l’esprit électeur choisit dans une lignée : ne peuvent être devins que ceux qui ont un ancêtre qui le fut déjà – mais le fait qu’il puisse s’agir aussi bien d’un ancêtre du côté des hommes que du côté des femmes élargit très grandement le nombre de candidats potentiels.

Quel est cet esprit électeur qui fait les devins ? Il porte plusieurs noms, qui ressemblent d’ailleurs davantage à des qualificatifs renvoyant à l’idée de savoir (seci) et de puissance (lulo), de renommée (bele) transmis par le rêve (semo) et permettant la vision (sele).

C’est sous le terme de Selerim qu’il est le plus employé.

Un récit raconte que Selerim est la fille d’un humain et de Laladum – ce puissant esprit forestier souvent traduit en népali par banjhẫkri, la chamane de la forêt.

Cet esprit prend deux formes : une forme « légère », Chirmarim (de chirma, les récoltes) qui ne fait pas trembler, et que la quasi-totalité des maîtres de maison honore chez eux, et Selerim, forme plus « lourde », qui demande un rite plus important.

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Le tos nokcho specialiste des rites collectifs territoriaux.

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LES SEANCES DIVANOTORIES

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La pratique des devins commence donc par la réalisation de ce rite privé qui a pour but de contenter l’esprit Selerim.

Les premières fois, le devin néophyte devra faire appel à un devin confirmé, qui sera son maître (guru).

Ce dernier, assis à côté de lui lors de ces séances, lui soufflera les incantations à prononcer.

Il viendra ainsi assister le néophyte jusqu’à ce que ce dernier sache par coeur le discours à prononcer.

Mais l’on aime aussi à dire que les bons devins apprennent vite, inspirés directement par l’esprit tutélaire.

Ce n’est qu’après plusieurs années de pratique, si l’officiant se sent apte et s’il paraît bon aux villageois, qu’il pourra être appelé à officier en dehors de chez lui, afin que son talent de clairvoyance, obtenu par sa relation privilégiée à Selerim, serve à déterminer les maux présents et futurs qui toucheront les membres de telle ou telle maisonnée.

Ces séances divinatoires sont appelées mopthom (« asseoir l’officiant »), mais plus fréquemment nommées du terme népali de cintā, littéralement « anxiété ».

Elles sont réalisées suite à une maladie ou autre infortune ou, le plus souvent, de façon préventive.

Elles ont toujours ce double caractère consultatif et thérapeutique : il s’agit de découvrir les maux passés et à venir, de les prévenir et de les soigner.

On distingue deux sortes de séances divinatoires : les « petites séances » et les « grandes ».

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LE SELEMOP, SPECIALISTE DU TRAITEMENT

DES INFORTUNES

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LE LACHOCHA SPECIALISTE DES FUNERAILLES

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Le nagimop, spécialiste des rites domestiques au Nagi.

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Les séances, nocturnes sont longues (de cinq à sept heures) ; elles attirent cependant de nombreux voisins, et les maisons où ces séances se déroulent sont le plus souvent bondées.

Une séance divinatoire se construit en fait sur le même modèle que le rite à l’esprit Selerim, auquel on ajoute des opérations de divination et, parfois, de guérison.

Avec encore plus de pratique, ils pourront aussi devenir demop, sorte de grade supérieur de devin.

Ils pourront alors réaliser des séances plus complexes (des séquences spécifiques sont rajoutées), qui impliquent une divination sultabop (2) et, surtout, les difficiles rites de gestion des morts violentes (ilwa).

Ce sont aussi ces devins – selemop et demop – qui pratiqueront la plupart des rites que doivent réaliser les Kulung, même si ces rites ne nécessitent pas, à proprement parler, leur talent de devin.

 

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Rite d’expulsion de l’esprit d’un mort de malemort.

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LES OBJETS UTILISES PAR LE DEVINS

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Présentons maintenant les différents objets  utilisés et manipulés par le devin lors de ces séances divinatoires, en précisant leurs origines et leurs usages.

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L’AUTEL

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La mise en place de l’autel est la première opération réalisée par le devin lors des séances divinatoires.

C’est collé à la partie basse du foyer, devant le lieu où il siège, que le devin commence à disposer différents éléments qui forment l’autel (selewacum, les affaires du devin) :

• À gauche, une branche de serbo (3), une herbe aux longues feuilles pointues réputée faire fuir sorcières et mauvais esprits, est plantée, et à droite, comme il est fréquent dans les rituels kulung, une branche de châtaignier au pouvoir régénérateur et purificateur.

Un bout de tissu (daja (N)) est accroché à ces deux branches, les transformant en fanion (lingo (N)). 

• Face aux pierres qui délimitent le foyer, il dispose d’abord la boîte en bambou qui contient les coiffes de plumes de l’officiant (cf. infra).

Devant elles, sont plantés en croisillons huit ibunam.

Les ibunam, que je traduirais par aspersoirs, forment un élément important de l’attirail du devin.

Il s’agit de bambous à l’une ou aux deux extrémités effilochées, servant à laver les corps et les âmes, à les protéger contre les attaques magiques, et permettant au devin d’effectuer ses figures de danse.

Ces aspersoirs ainsi disposés sont ensuite cernés de fil blanc ; c’est le bayaker.

Il sert à retenir l’ensemble des âmes de l’assemblée ; le devin les y déposera verbalement avant d’entreprendre son voyage rituel (4).

Puis on dispose des coiffes de plumes et des cornes de chèvre sauvage et de daim (5), préférablement trouvées par le  devin (s’agissait-il auparavant de trophées appartenant au devin, signe de son aptitude à la chasse ?).

 

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Divination sultabop.

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Femme devin néophyte répétant les  

incantations que lui enseigne son maître.

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Le devin effectuant une danse en tenant des ibunam, aspersoirs, que l’on voit aussi recouvrir les bords du tambour.

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Autel mis en place lors d’une séance divinatoire.

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• Devant la branche de châtaignier, le devin place un pot en métal dans lequel est disposé un bouquet fait de feuilles de châtaignier et de la plante serbo, recelant une pièce de monnaie.

Ce vase est nommé du terme népali kalash, en référence au récipient utilisé pour recueillir l’ambroisie divine, amrita de la mythologie hindoue.

Il contient une eau purificatrice puisée en neuf fois à la fontaine et qui sert à asperger l’officiant lorsque ses tremblements sont très forts.

• À côté, le devin dispose un panier contenant une mesure (pāthī (N)) de sarrasin dans laquelle une ou plusieurs coiffes de plumes sont plantées ; ces graines servent de projectiles que le devin lance devant lui ou par-dessus ses épaules pour se protéger.

Dans ce panier, se trouve une calebasse contenant de la bière, destinée à contenter l’esprit de la maison Tamsobom, qui pourrait s’irriter du fait qu’un rite ait lieu dans sa demeure. Ces calebasses de bière sont un élément important des rituels kulung.

Lors des grandes séances divinatoires, celles réalisées par les devins demop, huit calebasses, chacune portant un nom et destinées à un esprit ou usage spécifique, sont théoriquement requises.

• À la droite et la gauche de l’autel, de la bouse de vache – qui servira d’encensoir – est étalée.

Les assistants du devin y mettent des braises pour y brûler, en guise d’encens, du rhododendron séché ou du beurre clarifié. L’odeur doit réjouir les divinités.

• Devant l’autel bayaker, une assiette en métal contient une petite mesure de riz cru décortiqué, des lampes en argile brûlant du beurre clarifié et une liste hétéroclite d’objets.

Les plus courants sont des cristaux de roches, cawlung (« eau-pierre », ou parfois appelés « divinités », devatā (N)), que seuls ces officiants sont censés pouvoir trouver.

Parfois s’y ajoutent des graines de rudrākṣa (N), des bijoux, et souvent, si Selerim est l’esprit électeur, une toute petite serpette.

Bijoux et lumières sont là pour plaire à l’esprit électeur (un bijou est aussi utilisé lors du rite à l’esprit  Chirmarim, et « dispenser la lumière sur le monde »

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fait partie des demandes que le devin formule à son esprit électeur).

On trouve aussi d’autres pierres aux formes ou origines bizarres (comme les météorites), des cornes d’animaux divers, des plumes d’oiseaux, des épines de porc-épic, etc.

Tous ces éléments, qui forment une véritable collection de curiosités naturelles provenant de la forêt, semblent chargés d’un pouvoir évocateur particulier.

Et il semble qu’ils n’aient pas d’autres fonctions que de suggérer un monde de forces sauvages, monde avec lequel le devin va rentrer en communication.

L’autel et les curiosités naturelles qu’il contient font partie du décor mis en place par le devin.

Car les séances sont aussi des spectacles, et peuvent se lire comme une mise en scène qui crée une ambiance particulière (grâce à l’autel, au costume, aux odeurs, aux chants et aux danses) qui a sûrement son rôle dans l’efficacité de ce rituel (les séances divinatoires attirent d’ailleurs toujours un grand nombre de curieux qui viennent observer les chants et danses du devin).

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LE COSTUME

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Le devin vient habillé avec des vêtements propres (par respect pour son esprit électeur), mais une fois seulement l’autel construit, après avoir prié les esprits de la maison – qui auraient pu être perturbés – de ne pas s’irriter, et leur avoir demandé leur protection, la séance d’habillage peut débuter.

Le devin, par-dessus ses vêtements, enfile son costume : robe blanche, gilet noir, ceinture blanche, turban blanc et rouge, coiffe de plumes, coiffe tongkomma, colliers de graines rudrākṣa (N), qu’il croise sur son torse.

Il se ceint aussi d’une ceinture de cloches dans laquelle il insère sa machette.

Le costume du devin est proche de celui de l’ensemble des jhẫkri (N) du centre et de l’est du Népal (6).

• La longue robe blanche (jāmā(N)) est une sorte de combinaison faite d’une pièce qui habille tout le corps.

Ce vêtement, qui rappelle une robe féminine, n’en est pas moins réservé aux hommes : les femmes devins pourront porter n’importe quelle robe, sans distinction de couleur.

Aucune explication n’a pu m’être donnée sur la nécessité de porter ce vêtement, dont on me dit qu’il serait un emprunt des hautes castes Chetri, les anciens devins ne portant que des vêtements en fibre d’ortie nommés lalacar, tissés localement.

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Habillage du devin ; on voit clairement la robe blanche, jāmā (N), cintrée d’un tissu blanc à la taille.

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• Les colliers (malla (N)) sont faits de graines rudrākṣa (N), identiques à celles servant à faire les chapelets des renonçants, que les Kulung connaissent de longue date. Ils sont portés croisés sur le torse.

• Le tintement de la ceinture de cloches de l’officiant (pim, sampitokelerim en parler ancien, de kelerim : qui fait du bruit) est dit effrayer les mauvais esprits.

Ces cloches ne sont pas fabriquées localement, mais obtenues par le commerce.

Avant d’enfiler ses colliers et sa ceinture de cloches, il faut les « activer » (jāgnu (N)) à l’aide de formules, inaudibles au public. Le devin dépose dans un plat sa ceinture de cloches, ses colliers et deux petits paquets de feuilles.

Puis il jette des grains de riz sur ce plat en récitant une formule magique.

Il invoque alors le fameux héros épique Rām et son demi-frère Lakşmaņ du Rāmāyana, qui auraient créé les colliers de graines de rudrākṣa (N) que le devin demande d’activer – on dit que les grands devins d’autrefois faisaient alors danser les colliers dans l’assiette et avaient aussi le pouvoir de faire voler ces graines comme des projectiles contre les mauvais esprits.

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Les coiffes

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Sur la tête, les devins portent un classique couvrechef népalais (ṭopi (N).

Au cours de la séance, ils pourront porter une coiffe spéciale, faite de plusieurs éléments.

Elle comprend deux turbans, un rouge et un blanc (les couleurs de l’esprit auxiliaire) nommés « les tissus étrangers qui parent le corps » (toburimtharukhambajukham), dont un des assistants commence par coiffer le devin.

Les coiffes de plumes (waso) sont faites d’un ensemble de plumes serrées dans un morceau de métal qui finit en pointe (un devin en possède généralement une dizaine, autant qu’il s’en est confectionné).

Si les coiffes sont maintenant composées d’un mélange aléatoire de plumes, il est probable qu’autrefois,chaque coiffe était composée des plumes d’unseul oiseau, car elles sont encore rituellement nomméespar le nom de ces oiseaux, comme par exemple « la coiffe du poulet » (suruwashobotoku), « la coiffe du faisan” (towwashokiliwaso), du paon ou du khelwa (?).

On peut penser que ces coiffes renvoient aux capacités volatiles et visionnaires que le devin partage avec les oiseaux, mais ces interprétations ne m’ont jamais été formulées.

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Le devin charge, à l’aide de formule, la cendre qui est dans un plat et qui servira à protéger le corps des présents et les objets rituels.

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Coiffe variante : ce devin a aussi placé des coiffes de plumes au niveau des oreilles et dans son sac à main.

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En revanche, on dit qu’elles servent aussi d’armes pour tuer les mauvais esprits.

Pour reprendre les propos de Parsuram, un ancien de renom : « Ces coiffes sont des armes qui nous protègent des sorts.

Les devins d’antan, après  avoir récité leur généalogie, pouvaient les faire voler.

On dit tupribey-wasobey (les flèches d’os, les flèches de plumes).

Dans le temps, quand on tirait verticalement avec ces flèches, elles retombaient pile là d’où on les avait tirées.

Nous les avons depuis les temps  primordiaux. »

Son turban et ses coiffes de plumes mis, le devin peut aussi rajouter par-dessus une coiffe spéciale nommée tongkomma, en parlé rituel tobukharmalmarim, « orchidées attachées au corps ».

Il s’agit d’un bandeau fait d’épines de porc-épic et de petits bouts d’orchidées jaunes séchées, montés en macramé avec du fil d’ortie.

Personne ne sut me définir la fonction de cette coiffe, si ce n’est qu’on la compare parfois à une couronne royale et que sa beauté plaît à l’esprit électeur.

 

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Le devin charge, à l’aide de formules, la cendrequi est dans un plat et qui servira à protéger le corps des présents et les objets rituels.

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Usage de la coiffe de plumes comme arme par un devin : il l’a brandie comme un poignard devant une patiente pour faire fuir un mauvais esprit.

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LES TAMBOURS

 

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Le principal accessoire du devin est son tambour.

 

Il en existe deux types.

Le premier, le ḍhyāngro (N), proche du rnga tibétain (7) est un tambour sur cadre rond ou ovale à deux faces, dont le manche finit en pointe.

Le deuxième type de tambour est le thul

(ḍhol (N)), gros tambour sans manche, dont le fût fait environ cinquante centimètres de long et trente de large.

La peau est aussi de chèvre sauvage.

Comme pour le ḍhyāngro (N), des aspersoirs sont fixés autour.

Le ḍhyāngro (N) se joue à l’aide d’une baguette en bois courbé en forme de S, tandis que le thul est frappé par deux personnes tenant chacune une paire de baguettes droites, tous étant faits dans une sorte de liane épineuse (8).

 

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Tambour kulung au manche peu travaillé.

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Ces tambours ne sont utilisés que lors des cultes rendus à Selerim, incluant les séances divinatoires et les rites d’exorcisme des morts de morts violentes.

Il existe un lien entre le tambour et l’officiant électeur ; il lui est comme dédié.

On dit ainsi que les tambours  se mettent parfois à résonner tout seuls lorsque l’esprit Selerim demande un culte.

On me conta aussi l’histoire suivante : « Jantare a deux tambours : un pour le Selerim de son oncle maternel, un autre pour le Selerim de son père.

D’abord, il fut malade.

Il crut que c’était le Selerim de son père, et il fit alors un ḍhyāngro (N) et réalisa des séances divinatoires.

Mais

sa soeur, qui était en bonne santé, tomba malade et mourut.

Il sut alors que c’était le Selerim de son oncle maternel.

Il se fit alors faire un second tambour. »

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USAGE DES TAMBOURS

 

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C’est en battant son tambour ḍhyāngro (N) que le devin fait venir son esprit auxiliaire.

Une fois costumé, le devin s’assied en tailleur devant l’autel.

À ses côtés, deux assistants frappent à l’aide d’une corne de daim hurleur ou de jharal des plats en cuivre.

De son doigt imprégné du beurre des lampes, le devin trace sur deux plats en métal un trident, signe de Mahādev, et jette du riz dessus.

Il réitère alors l’opération sur les deux faces de son tambour et pose cendre, gingembre et riz sur le haut du tambour ; il s’agit « d’activer » le tambour (ḍhyāngro (N) jagāunu (N)).

On allume les lampes de l’autel, et le devin se met à battre régulièrement son tambour qu’il tient de sa main droite par le manche, devant lui, battant la face extérieure à l’aide de sa baguette tenue dans sa main gauche.

C’est ainsi qu’il récite sa généalogie élective et appelle son esprit électeur. Une fois venu celui-ci (ce que le public déduit en le voyant trembler), il passe généralement son tambour à un assistant. 

Le devin est alors, pour reprendre la terminologie de G.R. ouget (1980), « joué ».

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Devin battant son tambour ḍhyāngro (N) marqué d’un trident, symbole du dieu hindou Śiva-Mahādev.

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Après la première séance divinatoire proprement dite, lors de laquelle le devin réalise un premier diagnostic pour les membres de la maisonnée ayant requis une séance, le ḍhyāngro (N) est accroché à une corde derrière le devin, et l’on place au sommet du tambour un bouquet de feuilles de châtaignier.

Muni de ses deux aspersoirs, le devin peut alors effectuer les danses marquant les étapes du voyage rituel qu’il doit effectuer afin de récupérer la substance khow, grâce à laquelle il peut réaliser plusieurs opérations de guérison. Tout au long de ce voyage rituel, le ḍhyāngro (N) sera battu sur ses deux faces par ses deux assistants.

S’il s’agit d’une séance d’un devin confirmé, ce n’est pas le ḍhyāngro (N), mais le thul qui est accroché derrière le devin et qui est battu par les deux assistants.

Le thul est installé sur les premiers barreaux d’une sorte d’échelle en bambou qui est adossée au mur ; ce lieu est alors nommé balaker.

Cette « échelle », nommée ker, comporte quatre échelons (chacun fait de deux bouts de bambou, ce qui fait huit, le nombre évoquant la totalité).

En haut de l’échelle, un bouquet de feuilles de châtaignier est accroché.

Il sert, dit-on,  à effrayer les esprits.

Il évoque aussi un arbre, même si l’idée n’est pas exprimée.

Le tambour est accroché sur les premiers barreaux.

Pendant que le devin réalise le voyage rituel, le thul est battu par deux assistants assis chacun devant une face du tambour.

Le ḍhyāngro (N) reçoit donc le même traitement que le thul, comme s’il ne faisait que le remplacer.

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Système d’accroche du tambour ḍhyāngro (N) durant la séquence des danses ; il est alors battu par deux assistants.

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Système d’accroche du tambour thul ; on voit que l’accroche du ḍhyāngro (N) n’en est qu’une copie simplifiée.

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Notons aussi son usage un peu particulier lors de « l’autel des planètes » (grahako than (N)), construit dans la cour de la maison au fil des séances divinatoires afin d’éloigner l’influence néfaste de ces dernières.

On dresse dans la cour de la maison une branche de bananier (qui représente Yama rājā, le roi des morts), suivie de neuf autres symbolisant les sept planètes, l’éclipse (rāhu (N)) et la comète (ketu (N)).

On pose à côté une chèvre, un cheval et un éléphant confectionnés avec des tubercules et des branches.

Des fils relient les membres de la maisonnée assis sur l’auvent de cet autel, et le devin invite les éléments pathogènes qui siègent dans le corps des personnes présentes à quitter ces corps par le chemin de ces fils, en échange des offrandes présentes dans l’autel et de graines que les membres de la maisonnée jettent sur le tambour que le devin frappe par dessous.

Puis le devin tranche simultanément les cordes et le cou d’un poussin, tandis que l’assistance fait du bruit pour faire fuir les mauvaises influences, l’autel est ensuite détruit, et les restes jetés au loin.

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Devin se servant d’un plat comme tambour.

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L’autel des planètes.

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(… restes jetés au loin. ….)

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LE DHYANGRO UNE IMPORTATION RECENTE?

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Il existe une hiérarchie entre ces percussions, qui se reflète dans leur ordre d’acquisition : au début, l’apprenti se contente de battre une assiette en métal ; ce n’est qu’après un an environ qu’il se fera faire un ḍhyāngro (N), et après deux ou trois ans encore, quand et s’il maîtrise bien les incantations, qu’il pourra se faire faire un thul.

Car si ces deux tambours servent à appeler l’esprit électeur, leurs usages diffèrent.

Les petits tambours sont utilisés par les selemop et les devins des autres groupes, tandis que les longs tambours sont réservés aux devins kulung demop.

Les Kulung définissent souvent les devins de la façon suivante : « Les selemop, les jhẫkri (N), ce sont ceux qui jouent du petit tambour, tandis que les demop sont ceux qui jouent du grand tambour. »

Ainsi, l’interdit qui empêche les devins des autres groupes d’accéder à la fonction de grand devin se justifie parle fait qu’ils ne possèdent pas de long tambour ; « Les Sherpa, Tamang, ne peuvent être demop.

Ils n’ont pas de longs tambours, ils ne peuvent donc qu’être selemop, jhẫkri (N).

Notre grande tradition à nous, les Rai, requiert le thul. »

Chez les Kulung, contrairement à d’autres populations himalayennes, le tambour est peu porteur de signification ; il n’est pas non plus entouré de règles spécifiques.

Il peut être fabriqué par n’importe quel ancien.

La peau est, pour des raisons apparemment techniques, celle d’une chèvre sauvage (buks, ghoral (N), Naemorhedus sumatraensis ; de sexe indifférencié) : c’est celle qui donne la meilleure résonance.

Elle peut être achetée.

Le manche est parfois sculpté (serpent, trident, lune et soleil ou simples motifs géométriques) mais ce n’est pas une nécessité, et les dessins sont présentés comme n’ayant d’autre finalité qu’esthétique.

Il semble s’agir d’une simple imitation des pratiques voisines des Tamang et Sherpa, pour qui le manche ainsi taillé sert de phur-pa, ce poignard magique utilisé contre les démons ; mais chez les Kulung, le manche ne joue pas de rôle, et ces derniers évoquent un caractère uniquement esthétique ; les coiffes de plumes, elles, peuvent être utilisées comme armes rituelles.

Enfin, certains vieillards racontent que les anciens devins n’en avaient pas.

Bref, tout porte à croire que ce tambour est une importation encore peu intégrée au monde religieux kulung.

Le ḍhyāngro (N), clairement associé à la tradition régionale du jhẫkri (N), n’a d’ailleurs pas d’équivalent en kulung.

Il existe plusieurs termes en langage rituel pour désigner les tambours : camco holoker, camco suduker, camco turiker ou suduker-turiker, basilingker (9).

Ces noms viennent lorsque l’on demande comment désigner le thul, mais les choses sont plus confuses lorsque l’on demande le terme réservé au ḍhyāngro (N).

Les gens interrogés ont alors tendance à isoler un de ces termes pour désigner le ḍhyāngro (N), mais le choix du terme varie selon les informateurs.

Il semble en fait qu’il n’existe pas de terme spécifique en langue rituelle pour le ḍhyāngro (N).

Notons enfin qu’il n’est pas fait mention de tambour dans les récits mythologiques (il en est, en revanche, des coiffes de plumes).

Par contraste, il peut faire l’objet de glose poétique en népali, telle que cette formule, entendue dans les chants incantatoires d’un devin Kulung, décrivant le ḍhyāngro (N) comme « le tambour de Rām et Lakşmaņ, le tambour à la peau de daim dorée, au cerclage en cuivre » (10).

Il est aussi associé à Śiva-Mahādev, et un trident est parfois dessiné sur la peau du ḍhyāngro (N).

Notons enfin que certains devins confirmés ne l’utilisent pas lors des séances, se contentant, en plus du thul, de battre une assiette métallique.

D’après certains anciens, il en allait, il y a longtemps,  toujours de la sorte.

Les devins ne jouaient pas de ḍhyāngro (N), mais de petites cymbales (jeli (N)) apparemment proches des ting-shag tibétains (Helffer, 1994 : 160), nommées jeli.

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Devin effectuant une danse à l’aide de ses aspersoirs tout en tenant la corde qui relie son tambour ḍhyāngro (N) accroché au plafond.

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Usage du tambour ḍhyāngro (N) lors de la séquence de l’autel des planètes.

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CONCLUSION

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Le fait que le tambour – objet emblématique du devin – semble un phénomène d’emprunt, et plus généralement ces nombreuses références au monde hindou dans les séances divinatoires (Rām et Lakşmaņ, Śiva-Mahādev, collier rudrākṣa (N), récipient kalash, robe jāmā (N), etc.), tout comme la présence d’incantations en népali, peuvent paraître étranges.

 

En effet, pour beaucoup, le chamanisme est conçu comme relevant d’un ancien substrat religieux de l’Himalaya, qui se serait perpétué en dépit des courants civilisateurs portés par l’hindouisme et le bouddhisme.

 

J’ai défendu ailleurs (Schlemmer, 2010) que le prestige du devin d’un autre groupe, tout comme celui d’un devin qui voyage et qui s’est formé en dehors de sa communauté, semble tenir au fait que, les maladies venant du dehors et des autres groupes, il lui faut être au fait de cette altérité et connaître un grand nombre de remèdes étrangers, et ce dans cette langue de l’altérité qu’est le népali (11).

 

Luttant contre des forces perçues comme transcendant les frontières ethniques, et n’ayant d’autres obligations que de résultats, il paraît assez compréhensible que les devins des différents groupes de la région s’influencent mutuellement, chacun reprenant à son compte les techniques de son voisin, si elles se sont avérées efficaces.

 

Tout se passe comme si l’on se trouvait en présence d’une volonté ou, tout au moins, d’une prédisposition au mélange des traditions.

C’est peutêtre ainsi que s’est formée la figure pan-népalaise du devin jhẫkri (N).

Par ce terme, on désigne, du Sikkim au Népal central, les devins issus de différents groupes, mais qui portent un costume similaire, utilisent des techniques proches et partagent un même ensemble de références religieuses.

Il semble vain de vouloir trouver une seule origine à cette figure d’officiant, qui aurait été un centre de diffusion vers d’autres groupes.

L’hypothèse d’une diffusion est problématique ; l’absence de personnage similaire au jhẫkri (N) dans l’ouest du Népal, zone principalement habitée par des Indo-népalais, rend difficilement envisageable l’hypothèse d’une origine indo-népalaise de la figure du jhẫkri (N).

Il est tout aussi difficile d’envisager que la figure du jhẫkri (N) soit issue d’un groupe ethnique particulier pour s’être ensuite diffusée parmi l’ensemble des autres groupes du pays.

Ni archaïsme, ni héritage d’un fond asien ou autochtone, ni résultat d’une influence hindoue : le jhẫkri (N) serait né des interactions permanentes entre les diffé-rentes ethnies et de la symbiose de leurs traditions locales.

Ce qui pouvait, à première vue, être interprété comme de simples emprunts résultant d’un phénomène d’acculturation – que ce soit des figures d’esprits, des techniques rituelles, l’usage du népali ou des personnages comme les jhẫkri (N) – doit donc, selon moi, se comprendre selon une logique particulière des conceptions de ce qui relève de l’infortune et de la gestion de l’altérité.

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NOTES

1

Parce qu’ils sont surtout utilisés pour désigner toute personne pratiquant un rituel, je choisis de traduire les termes kulung mobowa et dhāmi (N) par « officiant », et le terme kulung de selewa (jhẫkri (N)) par « devin », et non par « chamane », terme qui me semble charrier trop de résentations erronées.

2

 Cette forme de divination implique de découper de longs rhizomes de curcuma sauvage (supla) devant un vêtement portant l’odeur du patient et d’observer si les morceaux tranchés d’un coup sec touchent ou non ce vêtement. Elle est spécifique aux groupes Rai.

3

Serbo, amliso (N), Thysanolaena maxima ou Thysanoleana agrostis. Différents groupes de la région prêtent à cette plante un effet protecteur (E. Kristvik, 1999 : 58).

4

D’après N. Allen (1976 : 514), qui note l’existence d’élémentsrituels similaires chez les Thulung Rai, cette barrière aurait aussi pour effet de séparer le devin du foyer, lieu associé à l’ancestralité.

5

Tahr himalayen (Hemitragus jemlahicus), thār (N), yas en kulung ; daim hurleur (muntiacus muntjak), mirga (N), kis  en kulung.

6

Voir par exemple la description de Macdonald, 1962, et plus généralement les différentes contributions dans le recueil de Hitchcock et Jones, 1976.

7

Pour une présentation des tambours tibétains et des cymbales, dont les Kulung font grand usage, voir Helffer, 1994.

8

Cette liane est nommée gongerwa en kulung et kukurḍāinu (N). Il s’agit de l’espèce Smilax zeylanica.

9

Camco renvoie au nom du bois camcopow dans lequel cestambours sont faits (remarquons toutefois qu’on retrouve la première syllabe dans un des noms du devin, bobimicamlomi).

Le terme ker désigne les bâtons servant à battre le tambour (jouer du tambour se dit ker him – peut-être de kerm : frapper). Je n’ai pas trouvé de signification au terme holo (grand ?), thuri et sudu.

10

Le daim (en fait ici un daim hurleur, Muntiacus muntjak, mirga (N)) semble faire référence à un épisode du livre III (Araṇyakāṇḍa) du Rāmāyaṇa dans lequel le démon Mārīca se change en daim d’or pour attirer Rāma et Lakṣmaṇa qui veillent sur Sītā, que Rāvaṇa cherche à enlever.

11

On notera toutefois qu’il existe un esprit errant que l’on dit d’origine sherpa, dont le rituel doit idéalement se faire dans la langue de ce groupe ; c’est donc l’idée de réaliser le rituel dans la langue dont est supposé issu l’esprit qui prime. Mais comme peu de Kulung parlent cette langue, des personnes de cette communauté sont alors conviées à réaliser ce rituel ou, à défaut, le rituel se fait en népali ; on retrouve ici la notion que le népali représente bien, de manière générique, la langue de l’extérieur.

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BIBLIOGRAPHIE

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Allen, Nicholas. 1976. « A pproaches of Illness in the Nepalese Hills », in : Loudon, J.B., « Social Anthropology and Medicine », pp. 500-552 (Academic Press,London-New York-San Francisco).

Bouillier, Véronique. 1992. « Mahâdev himalayen », in : « Classer les dieux ? Des panthéons en Asie du Sud », p. 173-187 (éd. de l’EHESS, coll. « Puruşārtha » n° 15, Paris).

Helffer, Mireille. 1994. « Mchod-rol. Les instrumentsde la musique tibétaine » (CNR S éd., MSH, Paris).

Hitchcock, John T. and Jones, Rex L. 1976. « Spirit Possession in the Nepal Himalayas » (Aris and Phillips, Warminster).

Kristvik, Ellen. 1999. « Drums and Syringes, Patients and Healers in Combat Against TB Bacilli and Hungry Ghosts in the Hills of Nepal » (EMR , Katmandou).

Macdonald, Alexander. 1962. « Notes préliminaires sur quelques “jhâkri” du Muglân », in : « Journal Asiatique », p. 107-138.

Oppitz, Michael. 2013. « Morphologie der Schamanentrommel » (Voldemeer, Zürich).

Rouget, Gilbert. 1980. « La musique et la transe »(Gallimard, Paris). 

Schlemmer, Grégoire. 2004. « Vues d’esprits. La conception des esprits et ses implications chez les Kulung Rai du Népal », Thèse de 3e cycle (ANRT Diffusion, Lille).

Schlemmer, Grégoire. 2010. « The illness is the other people: cross-representations and ritual management of alterity and illness among the Kulung (Nepal) », in : « Inter-ethnic Dynamics in Asia, Considering the Other through ethnonyms, territories and rituals », Part III , p. 154-166, edited by Christian Culas and François Robinne (Routledge  Contemporary Asia Series, London-New York).

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